Partenariat enregistré (Suisse)
La loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe, dans sa forme courte loi sur le partenariat ou LPart (en allemand Eingetragene Partnerschaft), est entrée en vigueur en Suisse le , après avoir été approuvée en référendum en 2005[1].
La Suisse est devenue le premier pays au monde où la reconnaissance des couples homosexuels a été accordée directement et largement (58 %) par le peuple.
Une réforme entrée en vigueur en 2018[2] permet l'adoption interne aux couples liés par un partenariat enregistré, c'est-à-dire l'adoption des enfants de l'un et l'autre des partenaires[3].
Objectif poursuivi
[modifier | modifier le code]La LPart, concernant exclusivement les unions homosexuelles, est une réponse fédérale à la reconnaissance de ces couples, après que certains cantons ont pris des dispositions sur cette question.
Si elle marque incontestablement un progrès essentiel dans la reconnaissance des couples de même sexe, cette loi est parfois perçue comme discriminatoire dans la mesure où elle ne met pas à égalité les couples homosexuels et hétérosexuels. Les interdictions explicites de l'adoption et de la procréation médicalement assistée (art. 28 LPart), par exemple, sont ressenties comme particulièrement injustes par une partie des lesbiennes et des gays.
Néanmoins, cette loi amène une reconnaissance politique et juridique importante des couples homosexuels. Elle introduit notamment plusieurs principes qui se trouvaient déjà dans le droit du mariage, comme le devoir d'assistance et de respect envers le partenaire (art.12 LPart) ou encore l'interdiction pour un des partenaires d'aliéner le logement commun sans le consentement de son partenaire (art. 14 LPart). Plus important encore, le texte fait du partenaire l'héritier légal en cas de décès (art. 31 a contrario LPart).
Genèse
[modifier | modifier le code]Après adoption de lois cantonales successives et en prévision de projets futurs, le Conseil fédéral réfléchit dès 2002 à faire adopter une loi fédérale visant à améliorer la situation juridique des couples homosexuels, car selon lui :
« Les solutions cantonales ont pour inconvénient majeur de se limiter aux seuls domaines entrant dans la compétence des cantons et de ne s’appliquer qu’aux partenaires résidant dans le canton qui a légiféré. Elles ne réalisent ainsi les exigences des couples homosexuels que de manière fort incomplète et ont une signification plus symbolique que pratique »[4].
La loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe (LPart, aussi appelée PEPS[5]) adoptée à une majorité de 3/4 des voix par l'Assemblée fédérale le , ouvre aux couples homosexuels certains droits et protections analogues à ceux dont bénéficient les couples hétérosexuels mariés :
- modification de l'état civil ;
- statut de parents-proches ;
- imposition commune ;
- sécurité sociale ;
- assurances ;
- indivision des biens ;
- même nom de famille (à partir du ).
Seules 3 procédures font exception et ne sont pas ouvertes aux couples homosexuels :
La loi prévoit également que les couples homosexuels mariés dans les pays où cela est possible (notamment les Pays-Bas, l'Espagne et la France) peuvent obtenir la reconnaissance de leur union dans la limite des droits prévus par la LPart.
La première union a été célébrée le dans le canton du Tessin[6].
Opposition et religion
[modifier | modifier le code]L'Union démocratique fédérale, parti conservateur, rassemble assez de signatures pour l'organisation d'un référendum facultatif contre la LPart, notamment grâce à l'appui d'autres partis de la droite suisse (l'UDC et DS). Organisée le , cette votation a permis l'adoption par le peuple suisse de la loi fédérale avec 58 % des suffrages (1 557 671 oui contre 1 126 578 non[7]) et son entrée en vigueur le .
Le , le Synode de l'Église évangélique réformée du canton de Vaud (EERV) a accepté le principe d'un rite pour les couples homosexuels en partenariat enregistré. L'Église protestante vaudoise est ainsi devenue la dixième en Suisse, et la première exclusivement francophone, à proposer un rite aux couples de même sexe, après notamment celles de Fribourg et Berne-Jura[8].
Précédentes initiatives au niveau cantonal
[modifier | modifier le code]Genève
[modifier | modifier le code]Dans le canton de Genève depuis le , les couples, quel que soit leur sexe, peuvent faire enregistrer leur union à la chancellerie d’État ou auprès d’un notaire, grâce à la loi[9] sur le partenariat du , inspirée du Pacs français.
Le terme Pacs est parfois utilisé dans le langage courant, car il est, comme le Pacs français, ouvert aux couples hétérosexuels (comme la loi sur le partenariat du canton de Neuchâtel, mais à la différence de la loi zurichoise, qui réserve le partenariat aux couples de même sexe).
Les premiers couples à faire enregistrer leur union à Genève - et donc en Suisse - l'ont fait le . Il s'agissait de deux couples homosexuels : Yves de Matteis, militant gay genevois, et son partenaire Patrick Berguer, ainsi que Florence et Nina, un couple binational franco-croate. Le premier couple hétérosexuel (Huguette Junod, féministe et auteure genevoise, et Jean-Pierre Clerc) s'est fait enregistrer quelques jours plus tard.
Ce partenariat enregistré genevois ouvre, sur le plan cantonal, les droits et obligations accordés aux couples mariés dans leur relations avec l'administration à l'exception des impôts cantonaux et des prestations sociales.
Un an après son introduction[10], 70 couples (homosexuels et hétérosexuels) ont fait enregistrer leur union, dont 24 entre partenaires étrangers (ou avec un partenaire étranger).
En février 2005, 215 partenariats d'homosexuels et 54 d'hétérosexuels sont totalisés (et 19 dissous).
Le , le canton de Genève a confirmé[11] que le partenariat genevois subsisterait en parallèle avec le partenariat de niveau fédéral.
Zurich
[modifier | modifier le code]Le , les habitants du canton de Zurich approuvent par référendum (62,7 % des voix) la loi cantonale sur l'enregistrement des partenariats homosexuels.
Excluant les concubins hétérosexuels, cette loi est pourtant plus généreuse que celle en vigueur à Genève.
En effet, les couples enregistrés qui s'engagent par contrat à faire ménage commun et à se porter assistance et respect sont égaux aux couples mariés en matière d'impôts (directs, des successions et des donations) et d'assistance sociale.
La loi, bien qu'elle ne soit applicable que dans le canton, prévoit en outre que « dans la mesure du possible, ils seront mis sur un pied d’égalité avec les couples mariés en matière d’exécution du droit fédéral ».
Entre et fin 2004, 383 couples ont fait enregistrer leur union auprès de l’office de l’état civil[12].
Neuchâtel
[modifier | modifier le code]En , le canton de Neuchâtel suit la même voie de reconnaissance des couples non mariés.
En , 35 couples hétérosexuels et 21 couples de même sexe ont bénéficié de ces nouvelles dispositions.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- « Partenariat enregistré entre personnes du même sexe »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), sur Site de la Confédération Suisse, (consulté le ).
- Sibilla Bondolfi, « Les homosexuels peuvent désormais adopter les enfants de leur partenaire », sur SWI swissinfo.ch, (consulté le ).
- « Adoption Limitee ».
- Message du 29 novembre 2002 relatif à la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe signé par Kaspar Villiger et Annemarie Huber-Hotz (respectivement président et chancelière de la Confédération suisse en 2002)
- Texte de la loi votée [1] sur le site des autorités fédérales de la Confédération suisse
- Arnaud Gallay, « Le Tessin célèbre le premier pacs de Suisse »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), sur 360.ch, .
- Certains cantons majoritairement catholiques et conservateurs ont refusé le projet dont le Valais et le Jura
- « EERV ».
- [PDF] loi 7611 du 15/02/2001 sur le partenariat (E 1 27)
- Le Courrier du 14.05.2002
- Règlement d'exécution de la loi d'application sur le partenariat enregistré (E 1 26.01)
- Bien que l'acte soit du ressort de ce service, il ne s'agit pas d’un document de l’état civil, mais d’un document de droit cantonal